Le temps n’est pas encore venu de parler de la mafia au passé, mais les coups portés par les juges italiens et les témoignages des « repentis » sur le fonctionnement de Cosa Nostra, brisant la sacro-sainte omertà, ont depuis quelques années entamé son mystère. Résurgence d’un vieux féodalisme sous l’écorce un peu tendre d’un Etat en mal d’unité, la mafia sut prospérer à l’ombre d’un centralisme complaisant qui s’accommoda des particularismes siciliens. Affranchie des règles en vigueur sur le continent, elle s’inventa les siennes, qu’adoptèrent sur leurs terres Calabrais et Napolitains, tout aussi rétifs à la modernité que représentait le pouvoir de Rome et de l’Italie industrielle du Nord. L’histoire de la mafia est celle d’une résistance avant d’être celle d’une organisation souterraine empruntant aux lois du crime les instruments de sa puissance.