
Jean-Marc Rouillan en charge du problème des parachutes dorés
La conversion de Nicolas Sarkozy à l’interventionnisme économique a pris un tour spectaculaire ce soir. Le président de la République vient en effet de confier à Jean-Marc Rouillan une mission interministérielle. La feuille de route de l’ex membre d’Action Directe est claire : moraliser le monde de la finance et régler notamment le problème des parachutes dorés.
La mesure peut paraître radicale, mais Nicolas Sarkozy avait prévenu le patronat : "Ou bien les professionnels se mettent d’accord sur des pratiques acceptables, ou bien le gouvernement de la République règlera le problème". Devant les atermoiements de Laurence Parisot et l’attentisme général du MEDEF, le président a pris le taureau par les cornes et envoyé un message clair aux patrons peu scrupuleux. L’impunité est terminée et la lutte sera impitoyable. Malgré tout, le chef de l’État a tenu à rassurer les entrepreneurs : "Les honnêtes patrons n’ont pas à craindre la loi. Mais nous ne nous laisserons pas intimider par quelques caïds de la finance internationale. Les comportements mafieux sont terminés. On va vous nettoyer tout ça au Kärcher".
Les centres de rétention pourraient sous peu devenir des centres de rééducation idéologique
La nomination de Jean-Marc Rouillan marque un tournant dans sa carrière. A ceux qui l’accusent de renier ses idéaux, il rétorque qu’il vient appliquer ses idées et qu’il ne fera aucune concession. "Je ne condamne pas toutes les politiques institutionnelles. On peut y participer à un moment donné mais cela ne doit pas être le cœur du projet" déclarait-il encore hier au magazine L’Express. Nicolas Sarkozy a justifié son choix en mettant en avant l’expérience de Jean-Marc Rouillan dans la gestion des abus patronaux. Le détenu en liberté provisoire approuve et admet que ce sera l’occasion pour "notre expérience de tirer son vrai bilan critique". Jean-Marc Rouillan pourrait s’entourer de ses anciens compagnons et notamment de Nathalie Ménigon : "Elle approuve ma décision. Elle rejoindra peut-être, à titre symbolique, la commission répression mais elle n’aura pas la même capacité d’action".
De l’action justement c’est ce qui est demandé à l’ex-terroriste. Il sait qu’il a peu de temps pour agir et pour convaincre. Pour lui le salut passe par une révolution, une lutte armée contre les excès. Et il n’entend pas être brimé dans son mode de fonctionnement. "Ce serait une démission. Le mot "révolution" signifie toujours "affrontement". Avec la bourgeoisie... Si on crée un instrument de lutte en renonçant à ce terme, cela signifie que les choix sont faits(..). Et à plus ou moins longue échéance, je serais naturellement éliminé de ce processus. Pas besoin d’envoyer une lettre de démission".
La police française possède déjà des outils très efficaces en matière de délinquance financière
C’est une sorte de panique qui a saisi les milieux financiers à l’annonce de cette nomination. Axel Miller, le président du directoire de la banque Dexia, a d’ores et déjà renoncé à son parachute doré et reversé l’ensemble de ses émoluments à des œuvres caritatives. Dans la foulée, les dirigeants des principales banques françaises ont avoué avoir misé sur des créances pourries par pur appât du gain et reconnu leur entière responsabilité dans la crise. Natixis a même suspendu son plan social, reconnaissant qu’il était ridicule de faire porter le chapeau aux salariés.
Effet plus inattendu, Carlos Ghosn a convoqué une conférence de presse pour annoncer qu’il renonçait aux suppressions d’emplois chez Renault.
Les spécialistes pensent que le chômage pourrait rapidement repartir à la baisse grâce à cet électrochoc.
Qu’est ce que c’est que ces conneries ?
Les réactions politiques n’ont pas manqué. Sitôt la nouvelle connue, François Fillon a abandonné l’idée de pillage du livret A, tandis que Patrick Devedjian s’est dit "surpris mais heureux de voir que l’ouverture porte ses fruits". L’opposition n’a pas manqué de railler les revirements du gouvernement et François Hollande a conseillé à Nicolas Sarkozy "de se débarrasser de ce personnage encombrant".
Publié par Monsieur Bernard
anik
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Jean-Marc Rouillan en charge du problème des parachutes dorés2 octobre 2008, par anik
je rajoute à ce texte celui de la louve sur bellaciao, car elle exprime bien la situation.
Marina Petrella, Cesare Battisti, Jann Marc Rouillan, Gérard Jodar, et tant d’autres, militants, hommes et femmes engagés, à un moment de leur vie ou toujours, dans la lutte contre le capitalisme, anonymes ou célèbres, la vague de répression qui s’abat actuellement sur ces représentants (y compris des "icônes du passé") de ce que l’on peut appeler au sens large le mouvement communiste (y compris libertaire, y compris anarchiste, y compris syndicaliste) ne cesse de prendre de l’ampleur.
Cela a commencé il y a longtemps, la liberté d’expression a toujours été menacée, mais cela a pris un tour particulier pour le collectif Bellaciao, il y a quelques temps, quand Roberto Ferrario avait été poursuivi par les Chantiers Navals de Saint Nazaire pour diffamation (entendez, publication d’un communiqué syndical qui n’avait pas l’heur de plaire aux patrons).
Depuis, les attaques féroces n’ont cessé de se multiplier.
Alors que Marina Petrella est toujours entre la vie et la mort (elle le sera tant que son extradition n’aura pas été purement et simplement révoquée), que Gérard Jodar, le secrétaire du syndicat kanak USTKE a été condamné avec de nombreux autres camarades à de la prison ferme pour leurs activités syndicales, c’est au tour de Jann Marc Rouillan, ancien fondateur d’Action Directe, condamné à perpétuité pour l’assassinat de G. Besse, d’entrer à nouveau dans la tourmente de la répression.
Qu’a donc dit Jann Marc de si extraordinaire qui mériterait que la semi-liberté qui lui a été accordée récemment, soit révoquée ?
Répondant strictement aux questions qui lui étaient posées par un journaliste de l’Express, je vous livre quelques passages de l’interview qui a déclenché les foudres de l’Institution et de l’Etat bourgeois.
"(...) Ces dernières années, la force de pacification des relations politiques était telle en France qu’elle désarmait tous les conflits, récupérait les initiatives révolutionnaires. Je ne sais pas si on va réussir à crever ce miroir aux alouettes. (...)"
"(...) Porter le conflit jusqu’à l’affrontement. Beaucoup de gens, actuellement, ne peuvent pas aller beaucoup plus loin dans la misère. Il va y avoir des problèmes ! D’ailleurs, l’Etat s’y prépare avec des programmes contre-insurrectionnels qui vont jusqu’à l’utilisation de drones... Que fera-t-on, à ce moment-là, en tant que révolutionnaires ? Appeler à voter Besancenot ou amener d’autres pratiques ? (...)"
"(..) Il faut clarifier les choses : le processus de lutte armée tel qu’il est né dans l’après-68, dans ce formidable élan d’émancipation, n’existe plus. Mais en tant que communiste, je reste convaincu que la lutte armée à un moment du processus révolutionnaire est nécessaire." (...)
Évidemment, il est devenu tellement inhabituel de lire ce genre de choses dans la presse, il est devenu tellement bienséant de taper à bras raccourcis sur le mouvement communiste, sur le communisme, et notamment celui qui ne se déconnecte pas ouvertement de ce qu’on peut appeler la "possibilité révolutionnaire", que l’on conçoit parfaitement qu’en ces temps troublés, Rouillan ait dégoupillé ce qui ne pouvait être vu que comme une grenade aux yeux du pouvoir en place.
Soyons clairs aussi.
Rien de ce qu’a dit Rouillan ne saurait rentrer dans le cadre des motifs susceptibles de légitimer la révocation de sa semi-liberté. On comprend parfaitement en quoi les propos qu’il a tenus ont du faire hoqueter de rage et de frousse certaines personnes qui tiennent aujourd’hui le peuple sous leur coupe en France. Loin de faire une apologie de la lutte armée, de l’émeute, n’évoquant même pas lui-même G. Besse, il situe son propos dans un contexte très précis, quasi philosophique, qui est celui de la révolution, de la lutte contre le capitalisme, et du communisme.
Si n’importe qui d’autre que Jann Marc Rouillan avait tenu les mêmes propos dans le cadre d’une conférence à Sciences-Po, ou d’une contribution du NPA ou du PCF sur le thème de "L’idée révolutionnaire aujourd’hui", ou encore "De la violence dans le mouvement communiste", comme on peut en entendre ou en lire tellement ici ou là, parfois avec moins d’intelligence, moins de mesure, il y a fort à parier que rien ne se serait passé.
Juste "pour rire", tiens, qui a dit cela :
« Vous pouvez saper le moral de l’occupant en distribuant des tracts mais, si vous tuez un Allemand ou si vous détruisez un char, l’action est immédiatement visible et concrète. (...) Il y a aussi dans la Résistance d’autres motivations : le goût de l’aventure, de la vengeance, de la revanche par rapport à une armée qui s’était totalement effondrée en 1940. »
C’est Olivier Wieviorka, professeur à l’Ecole Normale Supérieure, cité par France 2 !
Qui contestera aujourd’hui la légitimité et la justesse de la lutte armée, ainsi que pour la propagande en faveur de cette lutte spécifique, pour les Algériens indépendantistes, des résistants contre l’Allemagne nazie, des Républicains espagnols contre le fascisme franquiste, des vietnamiens contre la colonisation et contre l’impérialisme américain...?
Quand va t’on alors brûler des livres comme ceux de Beuvain et Moulain et a. "Révolution, lutte armée et terrorisme" publié chez l’Harmattan, ou celui de Serbat "Le PCF et la lutte armée" chez le même éditeur ? "L’art de la guerre" de Sun Tzu ? Interdire radicalement la publication du "Manifeste du Parti communiste" de Marx et Engels ? Condamner l’oeuvre de Lénine ? Les écrits de Che Guevarra ? Interdire les relations avec le Sinn Fein ?
Allons plus loin ! Brûlons la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, puisqu’elle s’est écrite, comme la plupart des révolutions (y compris la révolution portugaise, qu’on dit à tort "pacifique") dans les armes, le sang et les larmes ? Déclarons la révolution française scélérate !
Et que dire du "dangereux apologue" de la violence armée qui préside aux destinées de la France, lui qui répète à l’envi admirer les Etats-unis, pays de l’arme en vente libre, pays où le droit de se défendre est inscrit dans le 2ème amendement de la Constitution, je cite : "Une milice bien organisée étant nécessaire à la sécurité d’un État libre, le droit qu’a le peuple de détenir et de porter des armes ne sera pas transgressé."
Qui a écrit cela ?Lénine ? Rouillan ? Ménigon ? ! Que nenni...
La question de savoir si on est un terroriste ou un résistant est exclusivement une question axiologique, une question de valeur, de choix moral, une question dont la réponse ne dépend que de l’idéologie et du système dans et contre lesquels on situe son propos.
La lutte armée d’Etat autrement dit, la guerre est légitime si elle se fait dans le cadre de l’armée et pour défendre le régime soutenu par le pouvoir en place. Elle devient révolte, rébellion, révolution dans le cas contraire.
Ici donc, la boucle est bouclée et la liberté d’expression pour TOUS (y compris pour les communistes et les révolutionnaires) apparaît plus que jamais comme la liberté suprême, celle à défendre en premier lieu car sans elle, il peut ne plus rien y avoir que les ténèbres du fascisme.
Elle est celle dont l’étendue témoigne du degré de civilisation dans lequel nous vivons, celle aussi qui indique l’état de faiblesse dans lequel se trouve le système dominant, ici, le capitalisme, décidément bien mal en point pour ne plus pouvoir répliquer autrement que par la répression, la censure, l’enfermement physique.
Si la semi-liberté de Rouillan est révoquée, la juridiction aura fait ni plus ni moins qu’embastiller un homme ; si l’extradition de Marina Petrella n’est pas annulée, le pouvoir aura laissé mourir sciemment une femme pour ce qu’elle représente.
La défense de la liberté d’expression est un élément fondamental, central, de la lutte contre le capitalisme, qui doit être au cœur de l’activité de chaque communiste, chaque socialiste, chaque syndicaliste...
L’engagement personnel des uns et des autres, en faveur de ce combat (ou contre lui) témoigne de quel côté de la barrière on a choisi de se placer.
J’apporte et je renouvelle mon plein et entier soutien à Jann Marc Rouillan, à Marina Petrella, à tous les militants pourchassés, bâillonnés, enfermés, ici ou là, qui paie de leur corps, parfois de leur vie, leur engagement moral et politique pour le combat contre le capitalisme.
Je souhaite que nous soyons des dizaines de milliers à le faire quoi que nous pensions au fond des actes des uns ou des autres, de la méthode employée. Et y compris même si nous les condamnons.
Mais cette liberté fondamentale est bien ce qui trace la frontière entre démocratie possible, et "autre chose".
Je le remercie aussi d’avoir encore, aujourd’hui où tant se taisent, ce courage d’exprimer ce qu’il pense du communisme, de la révolution, de ne pas cracher sur les mots, et de ne pas se cacher derrière son petit doigt. Rouillan, comme d’autres camarades - un homme qui ne craint pas, qui chérit la liberté et qui se bat.
De : La Louve
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